Le groupe Tümata : Rahmi Oruç Gûvenç
Ma rencontre avec Oruç
Cette rencontre en septembre 2015 avec l’initiateur du groupe Tümata, Oruç Güvenç, a été vraiment l’éclairage tant attendu afin de légitimer ma transmission de la danse derviche dans une forme non codifiée et libre. Fort déterminée, je suis arrivée une après-midi après une traversée en bateau m’amenant plus au sud d’Istambul à Yalova. Avec un peu d’aide…, j’ai pu prévenir de mon arrivée et Azize sa femme est venue me chercher. Quelle chance j’ai eu d’être accueillie par Oruç dans sa maison à Yenimahalle. Je les remercie infiniment du temps qu’ils m’ont consacré. Oruç parle le Français et il a répondu à mes questions concernant l’origine de cette danse. Ainsi j’ai appris que de son vivant Mevlânâ avait tourné 3 jours et 3 nuits, 7 jours et 7 nuits, 16 jours et 16 nuit, et 40 jours et nuits de sâmâ non stop! (« livre the Legends of the wise » d’Ahmet Eflaki)
La vie de Mevlânâ
Et ce n’est que beaucoup plus tard que le sâmâ tel qu’il est donné actuellement a été codifié dans une forme telle que vous pouvez le voir en allant à Istambul ou à Konya, dans un temps limité à 30-35 minutes. Je vais bientôt recevoir ce livre « Mevlânâ » écrit par Oruç, qui retranscrit la vie de Mevlânâ. Quand on ne parle pas Turc, j’ose qualifier mes recherches de chasse au Trésor, et c’est pourquoi j’ai décidé d’apprendre cette langue pour continuer à approfondir mes recherches, tout un programme…
Oruç, un amoureux de la musique turque
Lors de ma visite à Yenimahalle, j’étais loin de me douter de toute l’immense oeuvre de recherche réalisée par ce maître soufi.
J’ai donc compris qu »Oruç Güvenç était musicien, novateur dans la musicothérapie en Turquie et dans d’autres pays d’Europe. Il a travaillé à la Clinique de Psychiatrique de la Faculté de Médecine de Cerrahpaşa en tant que Prof. Dr et est devenu le seul expert sur ce sujet en faisant un doctorat de psychologie clinique en musicothérapie. Il a également enseigné à la faculté de médecine de Cerrahpasa.
Qui est Tümata?
Tumata est un groupe de recherche créé en 1975 par Rahmi Oruç Gûvenç pour la promotion et la recherche de la musique Turque. Oruç s’est beaucoup intéressé aux musiques d’Asie centrale.
De nombreux instruments oubliés ont été ainsi reproduits et exécutés conformément à leurs originaux. Un groupe de de recherche composé de musiciens, danseurs et de chanteurs est né afin de faire vivre ces anciennes traditions. Il a formé beaucoup de musiciens. https://tumata-com.translate.goog/enstrumanlar/
Les semas non-stop
A travers le groupe Tümata, Oruç a organisé et mis en œuvre des sessions 3-5-7-9-16-40-66-99 et 114 jours » non-stop sema « dans différents pays du monde, le 66ème jour du dernier programme de sema de 114 jours , le 5 juillet 2017, Oruç est décédé lors d’une opération cardiaque. J’ai été averti par une amie rencontrée lors d’un séminaire d’Oruç à Zurich, quel choc pour ce départ inattendu de tous.
Ca y est : 3 jours et 3 nuits de Sâmâ
Il a fallu un heureux hasard pour que je puisse retrouver la trace d’un nouvel évènement de Tümata cet été de 2021. En effet depuis le décès d’Oruç, plus aucune rencontre n’avait eu lieu. C’est sa femme qui a relancé cet événement pour honorer sa mémoire, ainsi que de celle de son frère Yasar décédé en décembre 2022. Azize est là, émue de cet hommage rendue à son Bien-Aîmé, avec ses deux belles-fille qui jouent merveilleusement bien du Oud. Un cadre nous est donné avec des explications sur le Sâmâ. J’ai pu vraiment enfin vivre et danser le Sâmâ, des heures et des heures avec des musiques extraordinaires. Les groupes de musiciens se succèdent sans interruption jour et nuit dans une organisation parfaite.
Voir mon article https://dansetournante.com/retour-de-turquie-avec-le-groupe-tumata/
La transe
Le Sâmâ était raconté par Mevlânâ comme un évènement à forte participation basée sur la transe. Cependant une transe où chacun reste conscient, ne serrait-ce que la demande omniprésente de notre corps pour garder son équilibre. Et les danseurs, de toute nationalité, de toute origine spirituelle, se succèdent sur la piste de danse. Cette année, nous dansons au Teppe Park, un grand restaurant à Safran, et point de beau darga (salle de pratique réservée au sama), acceptation, et l’ambiance y est tout aussi recueillie. L’énergie monte de jour en jour. Oruç avait beaucoup d’ouverture pour accueillir toutes ces personnes!
Libre, enfin libre
Oruç m’avait répondu quand je le questionnais sur la posture des bras derviche :
« Quand vient l’extase, tu laisses les bras libre… », et ça je l’ai enregistré, car j’ai pratiqué aussi dans des formes plus didactiques. Et je vous assure que danser le sâmâ avec ces bras en hauteur toujours dans la même posture relève d’un fort entrainement… et m’a demandé de sublimer le cadre afin de trouver joie et sérénité. Cependant comme je le rappelle souvent, pour trouver sa liberté dans la danse, cela demande de passer par l’apprentissage de la technique de tournoiement, même pour ceux qui tournent rapidement avec aisance.
The divine love
Je transmets vraiment cette danse dans un esprit de fidélité à l’enseignement de Mevlänâ. J’aime et je respecte cette voie spirituelle du soufisme et je trouve cette phrase d’Oruç si vraie,… en Anglais : « Sema i a step and a prayer in the path towards divine love. One whirls sema with other people without losing the feeling of Oneness. Simultaneously, Sema symbolises the divine love towards God. Through this divine love one learns to love other people. »
