Danse sacrée derviche.

La place du sacré dans la danse derviche

La danse derviche s’inscrit dans une tradition ancestrale de danse sacrée

La danse des derviches tourneurs telle que nous la connaissons aujourd’hui a été initié par Rûmî au 13e siècle. Les Mevlevis étaient connus pour leurs dhikre ou chants effectués sous forme de « danse giratoire » ou danse derviche réalisée au cours d’une cérémonie nommée le sama.
La danse derviche est directement liée au soufisme, la voie ésotérique de l’islam, et donc à une tradition toute emprunte du sacré. En occident peu de gens savent que Rûmî était musulman. Tout en s’ouvrant intérieurement à la dimension incarnée et vivante de l’amour et porté vers tous ses concitoyens, Rûmî a conservé son appartenance religieuse dans un esprit complètement ouvert. Cela lui a valu d’être tellement aimé de tous et ainsi de promulguer la religion de l’amour.
Rûmî – dit Mevlana – a dit : « Hier est déjà passé, aujourd’hui, nous devons apporter du nouveau. »  Mevlana voulait ainsi signifier son désir d’ouverture et d’adaptation.

Parler du Sacré

Longtemps j’étais plutôt tiède à l’idée de parler de la place du sacré dans la danse derviche
En effet je me souviens bien lorsque j’étais danseuse, vers l’âge de 20 ans, le mal-être que j’ai ressenti à danser des chorégraphies qui m’étaient dictées par un maître de ballet et dont je ne comprenais pas le sens. Je me sentais littéralement comme une coquille vide. Et à cette époque je l’ai vécu comme un grand désarroi d’avoir tant travaillé, des heures et des heures à préparer ce corps dans une dure discipline, et de déboucher sur une incompréhension du sens de ma danse et de mon mouvement. En fait sans le savoir, je désirais donner un espace sacré à mon mouvement. Offrir au spectateur un message de paix et d’amour et de sérénité afin de l’aider dans son cheminement personnel. Lui apporter du réconfort…J’étais bien jeune, naïve et inexpérimentée.

« Ouvre-toi à moi Pour que je puisse en faire autant Et que dans le miroir de ton inspiration Je puisse contempler la mienne. »

danse sacrée devant un coucher de soleil au milieu des montagnes

C'est quoi l'esprit du Sacré ?

Alors maintenant j’ose dire ma vérité et lever ce voile.
J’ai cherché mes mots pour vous parler, et parler du sacré avec les mots des autres s’est révélé tâche ardue. Et pourtant je viens de recevoir en cadeau tout un carton de livres sur le soufisme, et donc directement reliés à cette recherche du Sacré. 
Je me suis posée et ai écouté cette petite voix qui m’a conduite à vous partager mon expérience plus que tous les mots écrits et enseignés.
Le Sacré existe par le regard que je porte sur ce qui m’entoure et se manifeste par mon intention d’être au plus près de ce que je suis.
C’est un peu comme une porte que j’ouvre en moi, qui change radicalement mon paysage interne et externe. Je rentre dans un espace ouvert et dilaté où mon mental est attentif à toutes les perceptions. J’y emmène tout ce que je suis, mes blessures et mon ego avec mon imperfection, c’est à dire réunie de toutes mes parties. Et surtout j’essaye de lâcher mes attentes, parfois j’ai posé une intention avant de danser et ensuite j’essaye de l’oublier, avec la foi que cela soit déjà manifesté. Et ouvrir cette porte du sacré en soi est un acte simple et enfantin, comme un enfant qui se tourne avec confiance vers sa mère. Et bien-sûr dans nos raisonnements d’adulte, c’est je pense bien difficile pour certaines personnes, aussi difficile pour moi à vivre sur terre avec mes semblables et à comprendre leurs tergiversations. Depuis que je suis petite, je crois avoir conservé cette innocence et ce lien ouvert avec le sacré. En fait plus souvent j’ouvre cette porte de l’espace sacré, plus elle reste entrouverte et voir le plus souvent ouverte et disponible pour m’aider dans mon quotidien. 

Histoire de porte...

Nasredine n’avait encore que 10 ans. Sa mère lui dit un jour :
– je dois partir au marché. Pendant mon absence, fais bien attention aux voleurs et, surtout, ne quitte pas la porte, sinon il risque de dévaliser toute la maison.
– Sois tranquille, mère, j’y veillerai.
Une heure après, la mère voit son fils se promener sur le marché avec la porte de la maison sur le dos.
– Malheureux ! Que fais-tu avec cette porte ?
– J’avais envie de sortir, et puisque tu m’as recommandé de ne pas quitter la porte, je l’ai enlevé et je l’ai prise avec moi.
Sagesse et malices de Nasreddine le fou qui était sage

le Sacré de la danse derviche

Vous me direz et alors quel rapport avec cette danse ? et peut-être avec un brin de colère, en quoi ma posture ne reflète pas l’esprit du sacré dans cette danse ? Et bien je ne peux aborder cette danse avec mon corps et la technique, même si c’est déjà le chemin en soi. Je vois en effet de très bons danseurs qui tournent avec aisance et dont les danses restent un peu sans parfum et vides de ce qu’ils sont. Danser c’est vraiment un peu comme de se jeter à l’eau tout nu…et les personnes qui balbutient leurs premières danses sont tellement belles et émouvantes ! Cela respire dans leurs yeux !

Voici quelques extraits d'une interview de la cheik Nur Artiran qui peuvent vous éclairer :

Quand je tourne je suis propulsée dans un espace où sont réunies toutes les appartenances spirituelles du monde sans aucune séparation. Et en cela j’ai un grand respect pour tous les maîtres soufis que j’ai rencontrés, je me relie et m’incline devant leur sagesse. Et ensuite je me tourne vers mon âme et mon bien-aimé comme le disent les soufis, un peu comme de me lover dans le berceau de mon coeur, au creux de moi. Je me rassemble de toutes les pièces du puzzle que je suis, je me pose dans ma respiration et confie ma danse à plus grand que moi. Je la vis vraiment comme une rencontre et un voyage intérieur vers un inconnu. 

Photo flou artistique de danse sacrée derviche
Et l’ingrédient primordial et indispensable à la fluidité de ma danse est l’Amour…
Et c’est en cela que cette danse est incroyable, elle nous porte à avoir un regard d’amour envers nous-même, et le chemin est là et me travaille à chaque danse. Et cela demande un temps différent pour chacun de se laisser aimer. Nous sommes tous un peu des handicapés de l’amour et la coupe est souvent trop pleine pour rajouter quelque ingrédient. Alors oui vider le trop plein, avec douceur et compassion, oser laisser transparaître ce qui nous habite. Et à travers la puissance de la spirale, le mental finit par capituler et lâcher la tour de contrôle, et doucement la transformation opère son effet libérateur.

Alors y'a"là où la connaissance fait faillite,
Le désintéressement fait merveille ;
Rendez-vous
Et vous flotterez
Entêtez-vous
Et vous sombrerez.....
Oubliez la chair
Oubliez l'esprit,
L'océan vous portera au pinacle ;
Soyez comme la cruche de la connaissance :
Confronté à la mer
Elle ne peut que se laisser ballotter ! »

Une femme exécute un tournoiement de danse derviche

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